Portraits Archives - Familles en affaires

Portrait de Vyckie Vaillancourt

Par Antoine Gence, Chargé de projets chez Familles en affaires 

Une histoire de famille qui perdure depuis près de 200 ans!

Grâce aux multiples changements et innovations menés par les différentes générations, l’entreprise continue de contribuer au développement économique de la région de Laval.

1) Une ferme familiale agile

C’est en 1823 que la ferme Vaillancourt se construit sur les terres de la ferme actuelle dès les premiers immigrants originaires de France. Depuis leur établissement, la ferme a connu sept générations différentes et, pour la première fois de leur histoire, ce sera une femme, Vyckie Vaillancourt, qui en sera à la tête.

La ferme s’est adaptée à un écosystème en perpétuelle évolution. Un changement de paradigme majeur, porté par ses arrière-grands-parents au début du XXe siècle, a permis de sortir d’une approche centrée sur l’agriculture de subsistance et le troc. Ils ont ancré une démarche commerciale et réussi à professionnaliser les pratiques agricoles afin d’optimiser leurs tâches et de s’adapter aux besoins du marché.

Depuis cette transformation, chaque génération de repreneur a su donner un nouvel élan à la ferme. Sa grand-mère, qui a lancé en 1959 le commerce de fruits et légumes, a par exemple instauré la vente aux particuliers. Cette nouvelle activité a permis d’accroitre la notoriété de la ferme dans la région, notamment auprès des acteurs locaux. Au début des années 2000, son père a, quant à lui, développé les activités florales au sein de la ferme grâce à un heureux mélange de passion et d’expertise. L’entreprise s’est alors dotée d’une nouvelle branche de services centrés sur la mosaïculture et proposés aux villes et organismes souhaitant aménager différemment leurs espaces paysagers. Ce nouveau créneau s’avèrera d’ailleurs capital pour pallier les mauvaises récoltes.

2) Remise en question

Bien que Vyckie Vaillancourt ait construit son identité et fait son éducation au sein de la ferme, l’idée de reprendre l’entreprise n’allait pas de soi. Elle avait vu son père vivre les difficultés du métier d’agriculteur et s’était dit que ce n’était pas pour elle.

Elle s’oriente donc vers des études universitaires en relations publiques. À l’obtention de son diplôme, elle travaille pendant près de 5 ans dans ce milieu. Le hasard fait qu’elle en vient à collaborer avec une entreprise familiale. Les dynamiques familiales dont elle est témoin l’amènent à percevoir l’entrepreneuriat familial sous un autre jour.

Durant cette période, Vyckie réalise qu’elle ne s’épanouit pas vraiment en tant que professionnelle dans le domaine des relations publiques. La vie faisant bien les choses, c’est à ce moment que son père entame une réflexion quant à son avenir et commence à planifier sa retraite. Dans ce contexte, il lui demande quels sont ses plans vis-à-vis de la ferme. Est-ce qu’il doit préparer une reprise familiale ou la mettre en vente ? Elle entreprend donc une réflexion profonde et réalise l’importance de son histoire et des valeurs familiales. Elle décide de rejoindre l’entreprise.

Pour développer sa légitimité et se préparer à la relève, elle débute en tant qu’employée « observatrice ». Cela lui permet de comprendre le fonctionnement de la ferme et de se faire une opinion sur les façons d’en améliorer les processus. Pour compléter son cheminement, elle retourne aux études à HEC Montréal en gestion et entrepreneuriat, afin d’apprendre de bonnes pratiques de gestion.

3) O’Citrus – Un projet à son image

Au cours de ses études à HEC Montréal, dans le cadre d’un cours avec le maître d’enseignement Fabian Moreno, elle est amenée à développer son propre projet entrepreneurial. Elle lance O’Citrus, centré sur sa passion pour les agrumes et aligné avec la réalité de sa ferme.

O’Citrus produit au Québec des agrumes exotiques destinés aux chefs, épiceries fines et distilleries. Cette initiative apporte un nouveau volet à l’entreprise et permet à Vyckie de s’attacher plus profondément à la ferme familiale. Ce projet lui tient à cœur et l’anime d’un sentiment de quiétude qui lui confirme qu’elle est à sa place.

O’Citrus a permis de développer un nouveau segment d’activités au sein de la ferme dont les retombées dépassent la simple vente des agrumes. En effet, l’initiative a énormément rayonné et a donné une visibilité médiatique à l’ensemble de la ferme. Cet enthousiasme lui a aussi permis de travailler avec de grandes distilleries québécoises et de valoriser la qualité de sa production.

Vyckie souhaite poursuivre le développement d’O’Citrus, tout en se donnant le droit de continuer à explorer de nouvelles avenues, comme l’agrotourisme. Cette posture entrepreneuriale lui permet non seulement de s’épanouir au travers de ses projets, mais aussi de renforcir sa légitimité dans le processus de relève, car la ferme familiale bénéficie de la diversification de ses activités et lui assure sa pérennité.

2023-05-17T10:50:26-04:00novembre 7 2022|Portraits|

Portrait de Mélissa Laflamme-Ouellet

Par Antoine Gence, Chargé de projets chez Familles en affaires 

L’après Familles en affaires, au sein de sa famille en affaires

Nous sommes heureux de vous présenter le parcours de relève de Mélissa Laflamme-Ouellet. Mélissa était chargée de projets pour Familles en affaires – HEC Montréal jusqu’à juin 2021, date à laquelle elle a rejoint l’entreprise familiale.

1) L’Histoire de l’entreprise familiale et son développement

Le projet familial commence au milieu des années 80 avec la volonté d’André Ouellet (grand-père de Mélissa) et de son gendre, Sylvain Laflamme (père de Mélissa) de se lancer en affaires. André, alors comptable dans une société de transport, il constate que les marchandises alimentaires brisées sont rachetées par les transporteurs qui ne savent toutefois pas comment valoriser ces marchandises. C’est face à cette constatation qu’il a l’idée d’acheter ces stocks de marchandises alimentaires brisées aux transporteurs et de les revendre à petit prix. Ainsi, André et Sylvain décident de lancer « Surplus Ouellet » en 1988, un magasin alimentaire dans la ville de Québec. Dès le début de cette nouvelle aventure entrepreneuriale, le caractère familial de l’entreprise est présent puisque plusieurs membres de la famille (grand-mère et tante) s’impliquent pour faire fonctionner le magasin. En 2008, André a fait le constat que l’épicerie et ses activités sont bien structurées grâce à son gendre à qui il proposa de lui vendre l’ensemble de ses parts, afin de pouvoir prendre sa retraite. Pour Sylvain qui venait de prendre le contrôle de l’entreprise familiale, la conservation de l’activité par les membres de la famille n’était pas une priorité. Il encouragea davantage ses enfants à faire des études et à faire carrière dans des secteurs plus lucratifs et avec de meilleures conditions de travail. 

C’est en 2016 qu’une opportunité de se développer dans des locaux plus grands a poussé le dialogue dans la famille. En effet, Mélissa, alors âgé de 26 ans, ne s’imagina pas prendre en charge ce nouveau projet seul. Toutefois, Jean-François, le frère de Mélissa, était très intéressé par le potentiel que représentait cet agrandissement. Il décida donc de rejoindre l’entreprise en 2016 pour épauler son père dans ce projet. En plus de déménager les activités de l’entreprise dans le nouveau local trois fois plus grand, l’image de marque fut retravaillée, l’épicerie est alors renommée Panier Extra. Mélissa, alors même qu’elle travaillait dans une autre entreprise, elle a participé au développement du site web, des réseaux sociaux et des campagnes publicitaires. Ses efforts en communication assurent une belle croissance et un bon positionnement de l’entreprise auprès des familles de Québec.

2) Le parcours de Mélissa

En terminant son baccalauréat en administration de l’Université Laval en 2012, Mélissa n’avait pas l’objectif de joindre l’entreprise familiale. Elle occupa différents postes où elle a acquis plusieurs compétences telles que la gestion d’un CRM, la communication interne et externe et le développement de site web. C’est à travers son expérience de chargée de projet chez Familles en affaires qu’elle suit des ateliers et des formations sur le repreneuriat familial qui lui permettent de reconsidérer l’entreprise familiale comme une avenue professionnelle intéressante. Il est cependant clair pour Mélissa qu’elle ne joindrait pas l‘entreprise familiale en l’état, mais elle était motivée par l’idée de créer un projet commun en famille. C’est en 2020 qu’une opportunité d’acheter une nouvelle épicerie (Marché Bonichoix) se présente à la famille. Cette acquisition amenait de nouveaux défis auxquels Mélissa s’identifiait, c’est donc en 2021 que Mélissa décida de faire le saut dans l’aventure familiale en participant à l’acquisition de cette nouvelle épicerie avec son père et son frère. C’est en juin 2021 qu’elle les rejoint à temps plein. Mis à part le soutien fiscal et juridique lors de l’acquisition de la nouvelle entité, la famille ne s’est pas fait accompagner dans le processus de transfert. Mélissa riche de son parcours chez Familles en affaires – HEC Montréal, elle partage ses apprentissages à son frère et à son père pour assurer le bon déroulement du transfert. À titre personnel, elle se fait aussi accompagner par un mentor de Réseau mentorat qui est lui-même issu d’une famille en affaires et qui l’aide à gérer les enjeux et les doutes qu’elle peut rencontrer. Dès son intégration dans l’entreprise familiale, Mélissa souhaitait se familiariser avec l’ensemble des activités de l’entreprise afin de bien comprendre le fonctionnement d’une épicerie et l’étendue des processus à faire évoluer, afin de bâtir sa légitimité. Toutefois, le transfert de connaissance entre son père et elle demeure un défi important, car comme beaucoup d’entrepreneurs, Sylvain a beaucoup de connaissances sur le fonctionnement de l’entreprise que lui seul connaît et qui ne sont pas ou très peu documentés. Un des mandats sur lesquels travaille Mélissa portait donc sur la définition et l’enregistrement de ces processus. Rapidement après son arrivée dans l’entreprise, une situation a fait en sorte que Mélissa a dû gérer deux épiceries en même temps pendant plusieurs mois. Bien que cet épisode fût éprouvant à gérer, cette épreuve a été très formatrice pour elle et a renforcé sa crédibilité auprès des parties prenantes. Aujourd’hui, après quelques mois à apprendre à travailler avec son père et son frère, Mélissa est heureuse de dire qu’elle partage une profonde complicité et une belle complémentarité professionnelle avec son frère. En effet, il est très centré sur les opérations et les activités de « plancher » alors qu’elle est très organisée et a de bonnes habiletés de gestion. Ensemble, ils forment une équipe soudée prête à relever les défis d’avenir de l’entreprise.

3) La vision d’avenir

L’objectif de Mélissa, dans les prochaines années, va être d’assurer le transfert des connaissances de son père pour lui permettre de prendre une retraite bien méritée. Elle souhaite, par la suite, utiliser ses expertises en gestion, développées lors de ses expériences professionnelles précédentes, afin de les mettre à profit de l’entreprise familiale. Cette professionnalisation des activités est une priorité pour eux, afin de dépasser le seuil de développement qu’ils ont atteint et assurer une croissance à long terme. Enfin, pour structurer le risque lié à leur activité, ils planifient aussi la création d’une société immobilière afin de sortir les actifs immobiliers de l’entreprise.

Nous souhaitons nos plus sincères souhaits de réussite à Mélissa et à son frère dans leur projet de reprise !

2023-05-19T15:03:55-04:00mai 27 2022|Portraits|

Portrait de Léopold Marraud des Grottes

Par Catherine S Beaucage, Directrice transfert et rayonnement chez Familles en affaires 

L’origine : La beauté peut changer le monde

À l’origine d’Élitis, il y a un homme visionnaire, Patrice Marraud des Grottes, entrepreneur français qui avait le désir d’apporter quelque chose de différent et de transformatif dans le monde de la décoration d’intérieur. Marqué par plusieurs événements majeurs dont la Biennale de Paris, Patrice Marraud des Grottes décide de créer Elitis en 1988, porté par l’idée selon laquelle « la beauté peut changer le monde ».

 

Le développement

Pour initier ce projet entrepreneurial, Patrice Marraud des Grottes a la chance de bénéficier du soutien de ses soeurs. Et c’est autour de ce travail collectif et familial que les piliers de l’entreprise Elitis se construisent. Patrice Marraud des Grottes a d’ailleurs à coeur de valoriser cette conception d’une entreprise, une vocation et une vision servies par une famille.

Au fur et à mesure du développement d’Elitis, des employés rejoignent progressivement ce premier noyau familial et se voient intégrés avec la même chance que les membres de la famille Marraud des Grottes.

Afin de préserver l’innovation et la créativité, Patrice Marraud des Grottes opte très tôt pour un management centré sur l’Humain, très peu hiérarchique et très peu cloisonné.

 

L’histoire de Léopold Marraud des Grottes, membre de la 2e génération

Parallèlement à cette aventure entrepreneuriale, Patrice Marraud des Grottes devient également le père de trois garçons, qui vivent pleinement le développement de l’entreprise Elitis au rythme des voyages d’affaires et des récits de leur père. Pour l’un d’entre eux notamment, Léopold Marraud des Grottes, chaque moment de retrouvailles représente un souvenir extraordinaire, où il est captivé par les récits de son père. Enfant, il s’imagine Grand Reporter, faisant lui aussi le tour du monde!

Devenu jeune étudiant, il s’oriente vers une formation commerciale à l’ISEG dans la branche SUP, spécialisée en finance et en commerce international, absorbé aujourd’hui par l’ISG. Puis, sur les conseils de son père, Léopold complète cette formation par un MBA à l’université St. John’s de New York en 2007. C’est ainsi que le jeune homme découvre l’univers de la musique électronique, où il débutera sa carrière dès 2008 en tant que Manager de tournées au sein d’un label de musique à Berlin en Allemagne.

 

Le passage au sein de l’entreprise familiale

Cette première expérience professionnelle dans le secteur de l’événementiel musical est riche d’enseignements pour Léopold.  

Rapidement, Patrice Marraud des Grottes propose à son fils de mettre à profit son énergie et son désir d’expérience au sein de l’entreprise familiale. Il évoque notamment avec lui l’un des axes de développements majeurs pour Elitis : poursuivre le développement des canaux de distribution et des showrooms à l’international.

C’est ainsi que Léopold Marraud des Grottes rejoint l’aventure familiale en 2011 en tant que responsable commercial export. Conjointement avec Patrice, les deux hommes décident de commencer la poursuite de ce développement par le marché Nord Américain. Léopold s’installe alors à Miami pendant 2 ans pour développer les USA, puis enfin à Barcelone qui lui servira de base pour commencer à se rapprocher du siège de Toulouse et partir régulièrement sur l’UK, la Hollande, le Moyen-Orient et l’Inde.  Sur l’ensemble de ces pays, Léopold met en place un réseau de distribution et anime celui-ci par des visites intensives.

L’opération du développement d’Elitis à l’international apporte des résultats probants et Léopold Marraud des Grottes gagne ainsi en légitimité au sein de l’entreprise. C’est donc tout naturellement qu’en 2015, Patrice Marraud des Grottes évoque avec Léopold la possibilité qu’il lui succède à la tête de l’entreprise familiale.

Léopold devient donc Directeur Général d’Elitis, en co-direction avec sa cousine, Julie Marraud des Grottes. Cette gouvernance à 2 têtes est proposée par Léopold lui-même qui y voit une parfaite complémentarité de profils et de compétences nécessaire au succès de la future croissance de l’entreprise. Julie connait par ailleurs extrêmement bien l’entreprise également puisqu’elle y exerce depuis 2007.

C’est ainsi que le plan de transmission de cette belle entreprise est initié, prévoyant un transfert plus important des responsabilités et des pouvoirs en 2020.

De retour à Toulouse, après ses années de développement à l’international, Léopold endosse progressivement ses nouvelles responsabilités de Directeur Général. Il souhaite faire évoluer le mode de gestion, certains processus et certains outils technologiques.

Pour se donner davantage d’aptitudes managériales, il démarre en Juin 2021 à l’INSEAD une formation d’Executive Coaching.

 

Vers un rôle plus stratégique

En Mars 2020, comme toutes les entreprises de la planète, Elitis est touchée par le 1er confinement. Souhaitant sécuriser la situation de l’entreprise dans cette période de forte incertitude, le fondateur, Patrice Marraud Des Grottes, décide de réintégrer Elitis.

Cette période de co-gestion avec Patrice et Julie, amène Léopold à réaliser que sa valeur ajoutée la plus grande ne se situe pas au niveau de la Direction Générale, mais à un niveau plus stratégique en tant qu’analyste ainsi qu’au sein du Conseil d’Administration.

2023-05-19T15:03:51-04:00février 22 2022|Portraits|

Portrait de Bill Bernholc de Lester’s Deli

Par Antoine Gence, chargé de projets chez Familles en affaires 

Bill Berenholc, plus connu sous le nom de « Monsieur Lester », est aujourd’hui à la tête de Lester’s Deli et d’autres entreprises en lien avec le smoked meat, ce sandwich mythique qui donne à Montréal sa saveur si particulière.

Lester’s Deli, avec ses 70 ans d’existence, représente bien plus qu’un simple restaurant. Ce restaurant est réellement devenu une institution culinaire dont le nom a traversé les générations et les guides touristiques. Toutefois, derrière ce nom se cache la famille Berenholc qui est à la tête du restaurant depuis 1956.

L’histoire de la famille commence avec Ruth, née au Québec de parents immigrants russes et d’Eddy arrivé de Pologne après la Seconde Guerre mondiale. En arrivant à Montréal, Eddy, marqué par la guerre et les pénuries alimentaires, avait l’objectif de travailler dans un restaurant afin d’assurer la sécurité alimentaire de sa famille et ne plus connaître la faim. Il commença alors à occuper plusieurs fonctions au sein de restaurants montréalais. Attiré par le smoked meat, il commença à apprendre par lui-même ce type de coupe de viande. L’engouement pour ce mets commença à se répandre à Montréal et cette compétence de découpe de la viande devenait de plus en plus demandée. C’est ainsi qu’en 1951, il fut approché par la famille Lester pour travailler dans leur nouveau restaurant Lester’s Deli. Après cinq ans au service du restaurant, la famille Berenholc eut l’occasion de reprendre le restaurant. Ils en firent l’acquisition en 1956.

Pour le Eddy, cette acquisition était l’opportunité de valoriser son talent et de développer un restaurant qui était déjà bien connu dans le quartier. Ce sont leur attachement à cette enseigne et le fait que tout le monde les associait à Lester’s Deli qui les ont poussés à garder ce nom même si celui-ci n’était pas le leur. Bien que le restaurant avait déjà une réputation, les efforts de la famille et la rigueur apportée dans les activités leur ont permis, avec les années, de bâtir une réelle institution dont le nom s’est progressivement exporté hors de Montréal.

Bill, très complice de son père Eddy, commença à s’impliquer naturellement dans le restaurant au début des années 1970. Riche d’études en marketing, il se rendait progressivement compte du potentiel du restaurant. Cette réalisation confirma son orientation professionnelle au sein de Lester’s Deli. Cependant, pour Bill il fallait valoriser son smoked meat en dehors du restaurant.

Bill était confronté à la difficulté de distribuer son smoked meat hors de son restaurant, car celui-ci nécessite une expertise de cuisson, de coupe et des conditions particulières de production. Face à cet enjeu, il commença à réfléchir à de nouvelles alternatives pour faire connaître son produit. C’est donc animé par cet enjeu qu’il se mit à chercher des alternatives. Il trouva alors une technique de conservation sous vide, très peu répandue dans les années 80, qui lui permettait de conserver les principales qualités de son sandwich tout en permettant son transport. Après plusieurs essais qui lui permirent d’optimiser le processus, il présenta le résultat à son père qui le laissa poursuivre son projet.

Animé par le nouveau potentiel de son smoked meat sous vide, il se mit en tête de le proposer à d’autres restaurants et bars sous le nom de Mr. Smoked Meat. Bill souhaitait ainsi protéger l’image de marque de Lester’s Deli. Cette nouvelle activité lui permettait de servir de nouvelles villes du Québec. Fier de ce succès, il commença à réaliser qu’il pouvait, lui aussi, distribuer son produit et décida d’ouvrir deux franchises entre 1982 et 1983. Face à la réussite de ces projets, son père commença à lui laisser la gestion de l’entreprise familiale.

Bill ne manquait pas de créativité pour valoriser ses produits et renforcer sa proximité auprès de la clientèle. Il a ainsi généralisé la prise de commande par téléphone au milieu des années 80 et permis un service de prise de commandes par fax à partir des années 90. C’est riche de ce paradoxe entre la tradition et l’innovation, si caractéristique aux entreprises familiales, que le restaurant a continué à attirer des clients. Une tradition liée aux recettes, aux méthodes de travail et au décor des lieux, et une innovation liée à la mise en valeur de l’expertise et des produits et la capacité à connecter avec une clientèle de plus en plus grande, c’est ce qui caractérise Lester’s Deli.

Dans cette perspective d’innovation, l’implication de la fille de Bill a permis la mise en place d’un service de commande en ligne. Ce service, initié par Bill, a maintenant un nouvel outil pour se développer. Ainsi, avec le soutien de la 3e génération, ils ont développé tout un service de commande en ligne pour les particuliers et pour les restaurants dans l’ensemble du Québec.

La plus grande préoccupation pour Bill se porte maintenant sur la meilleure façon de pérenniser son activité. À cet égard, il ne cache pas son inquiétude sur sa capacité à assurer la continuité de son activité qui est selon lui vouée à se transformer. Cette transformation rendra impossible le maintien de l’expertise et des méthodes de production traditionnelle. À 65 ans, il se voit bien prendre sa retraite, mais il ne se sent pas être la bonne personne pour accompagner toutes les transformations requises. Toutefois, aucun plan de relève n’est encore défini et, malheureusement, Bill n’est pas sûr de pouvoir conserver l’entreprise sous le giron de la famille.

Riche d’un patrimoine culinaire, Bill a réussi avec son père, sa fille et ses employés à créer une institution qui traverse les générations et les frontières. Ce lieu, au style des années 50, est volontairement conservé et transmet, dès notre entrée, une émotion singulière qui nous fait sentir l’âme de Lester’s Deli qui a réussi à traverser les époques en fêtant ses 70 ans cette année. À l’image de son succès, les murs du restaurant sont étoffés de photos et de manches de journaux qui retracent l’histoire et le passage de personnalités venues déguster un smoked meat chez M. Lester.

2022-01-07T08:48:31-05:00décembre 9 2021|Portraits, Nouvelles|

Portrait de Jacques Deschênes

Par Antoine Gence, chargé de projets chez Familles en affaires 

1️⃣ L’histoire et les racines familiales de Jacques Deschênes  

Jacques Deschênes est né le 19 avril 1935 à Montréal, d’un père spécialisé dans le domaine de la plomberie, plus particulièrement dans le chauffage à vapeur, et d’une mère au foyer. En 1940, son père François Miville-Deschênes alors âgé de 50 ans acquit Langelier & Fils. Jacques avait alors cinq ans. La piètre situation financière de l’entreprise déteignait tout de même sur la situation familiale. Les Deschênes naviguaient entre la classe moyenne et populaire. La famille aimait recevoir ses proches, mais la préoccupation de « faire attention aux dépenses » se faisait toujours présente. Il fallait s’assurer d’avoir assez pour les jours qui viennent ; seules les familles qui ont connu des temps plus durs pouvaient en partager le sentiment.

L’histoire de la famille Deschênes est marquée par la figure de Francois Miville-Deschênes qui a eu une forte incidence de la familles Deschênes et de leur société. Orphelin depuis son plus jeune âge, François retranscrit l’absence paternelle avec ses enfants. Son affection et l’amour qu’il leur portait transparaissaient par des attentions et des activités plus subjectives et distantes. Au-delà du travail, il était profondément attaché à son identité francophone. Pour lui, il était essentiel de mettre de l’avant et défendre les intérêts nationalistes et surtout de conserver la langue française.

Dès l’âge de cinquante-sept ans, des problèmes de santé se sont installés de manière omniprésente. La peur de la mort, l’incertitude de l’avenir, et la question «Y aura-t-il, un lendemain » habitaient de manière omniprésente leur vie. Au travers de cette incertitude, il en résultait l’impossibilité de concevoir l’avenir, et le contraignait lui et sa famille à s’en tenir au présent, animés par une simple volonté de survie.

L’histoire et les valeurs de François furent ainsi la fondation du parcours et de l’avenir de la famille Deschênes.

Dès l’acquisition de Langelier & Fils François renomma l’entreprise Deschênes & Fils Ltée. Ce nom, si prémonitoire, était un appel à vocation naturel pour Jacques. Le pluriel rappelle qu’il s’agit néanmoins de l’histoire d’une famille, avec trois frères pour la relève. Paradoxalement, derrière cet espoir pour François de voir ses fils rejoindre l’entreprise familiale, les discussions autour de l’entreprise brillaient par leur absence. Toutefois, dès qu’il le pouvait, en particulier lors des pandémies de rougeole, scarlatine, etc., qui étaient courantes et que les écoles fermaient pour une courte durée, il les emmenait à l’entreprise ce qui les initiait à son type de travail, en espérant qu’ils s’intéresseraient à celle-ci.

Ce n’est qu’en 1947, lorsque le François commençait à devenir malade que le choix de rejoindre l’entreprise n’était plus un choix, mais une obligation morale de soutenir leur père face à cette adversité, lié à sa santé.

Jacques qui était plus jeune voit ses frères aînés se joindre naturellement à l’entreprise de leur père, en renonçant pour l’un à des études supérieures.

La maladie de François, qui mettait toute la famille dans un mode survie, a contraint Jacques, à vivre sans réelle aspiration professionnelle ou personnelle. Son avenir et celui de sa famille étaient bornés par la peur et les conséquences qu’entraineraient la mort de leur père. De cette situation ont émergé un besoin et un intérêt à se débrouiller pour gagner un peu d’argent. Jacques a donc accumulé plusieurs petits emplois, comme distribuer le journal, faire de la livraison… qui lui a permis d’assumer ses dépenses personnelles. Pour se vider l’esprit, il partageait avec ses frères et ses amis une passion profonde pour le sport et la nature. Celle-ci lui offrait un répit dans sa vie d’adolescent. C’est naturellement à la fin de son école supérieure (secondaire), en 1954, qu’il rejoint l’entreprise familiale par devoir pour celle-ci.

 

2️⃣ L’évolution du Groupe Deschênes  

Lorsque François Miville-Deschênes a acquis l’entreprise en 1940, son objectif était de capitaliser sur son expertise dans le chauffage à vapeur au sein du marché québecois. De plus, son activité et son développement étaient compromis pendant cette Seconde Guerre mondiale, car l’approvisionnement de marchandises passait après les efforts de guerre. Bien que François fût expert dans son domaine, ce n’était pas le cas dans les processus de gestion adaptés.

L’arrivée progressive des fils à partir de 1951 et leur cheminement a permis à Deschênes & Fils Ltée de mieux évoluer. Dès son intégration en 1954, Jacques comprend qu’il doit lui aussi apporter une réelle plus-value à l’entreprise. C’est donc cette même année qu’il entreprend une formation en cours du soir en plomberie, chauffage, et chauffage à vapeur.

La mort de leur mère en 1956 marqua un tournant dans l’entreprise familiale, où François, marqué par le deuil de sa femme s’impliqua de moins en moins. Peu de temps après, le principal dirigeant sous François quitta l’entreprise. Pierre l’aîné de Jacques prit alors la relève pour occuper le poste que l’on désignait alors comme gérant, Pierre n’avait aucune formation ou préparation pour assumer de telles fonctions. L’implication des trois frères devint par la même occasion plus importante. Face à cette situation, Jacques, conscient qu’il devrait davantage participer à la gestion de l’entreprise, prit l’initiative à partir de 1958 d’aller se former à HEC Montréal qui offrait des cours du soir sur différentes thématiques (administration des ventes, marketing, publicité…). En 1959, les trois frères proposèrent à leur père un plan de rachat de ses actions. Les frères ne disposant que de très peu d’apport personnel, il fut convenu que ce qui lui était dû lui serait remboursé graduellement, ce que François accepta, il quittait alors officiellement ses fonctions.

Durant les années qui ont suivi la vente, les frères continuèrent à développer l’entreprise jusqu’en 1973, où un concurrent leur proposât de racheter leur activité. À ce moment-là, ils étaient partagés : d’une part les deux frères de Jacques qui considéraient qu’ils avaient atteint un certain plafond de verre et que cette offre représentait une belle opportunité de sortie ; de l’autre, Jacques était convaincu qu’il pouvait faire aussi bien que ses gros concurrents anglophones et qu’il était capable de développer davantage l’entreprise familiale. Il a pu emprunter le montant nécessaire et procéder au rachat comptant de leurs parts, à la même valeur que l’offre externe.

À l’issue d’un transfert expéditif de responsabilité avec son frère aîné, Jacques nouvellement président-directeur général, apporta une stratégie centrée sur le besoin de se développer et de s’étendre pour survivre à la concurrence. Pour accompagner cette nouvelle orientation, Jacques a transformé les méthodes de travail au sein de ses équipes afin de promouvoir une culture participative et orientée sur la résolution de problème.

Grâce à ses nouvelles pratiques internes, Jacques a instauré une stratégie d’expansion qui lui permit dès 1977 d’ouvrir deux nouvelles succursales à St-Hyacinthe et Laval. À la suite, d’une stabilisation de ses activités, ils commencèrent à effectuer une première acquisition à Montréal 1980, à Québec en 1984, suivi d’une autre à Ottawa en 1987. Cette dernière représenta une fierté singulière pour qui venait d’intégrer un marché anglophone et ainsi lui donner raison sur la capacité des Québécois à faire aussi bien que les anglophones et de venir les concurrencer sur leurs marchés. En 1988, pour accompagner ce développement, il développe une société mère, le Groupe Deschênes Inc. que nous connaissons mieux aujourd’hui, et qui regroupe l’ensemble des filiales de la famille dans cette industrie. Ces acquisitions n’étaient que le début de sa stratégie de croissance par acquisition.

Pour accompagner cette stratégie d’acquisition, Jacques commença à s’impliquer progressivement dans des activités de rayonnement externe, en lien avec son industrie et son impact local, qui lui permettaient de se positionner dans son marché, de se rapprocher de ses clients et de leur besoin, et tout en étant aligné avec ses valeurs.

Ainsi, Jacques occupa des postes-clés au sein du Canadian Standards Association, de l’institut Canadien de la Plomberie et du Chauffage, la vice-présidence de Chambre de Commerce du District de Montréal, et tant d’autres. Ainsi, sous la direction de Jacques Deschênes entre 1973 et 2000, leur nombre de succursales est passé de 1 à 50, permettant à l’entreprise familiale sur la même période de passer de 10 M$ de chiffre d’affaires à 225 M$.

 

3️⃣ Le développement de sa relève  

Pour assurer la gestion de ses activités et planifier la transmission de l’entreprise familiale, Jacques créa en 1976 Les Entreprises Mirca Inc. et qui rassembla l’ensemble des actions participantes liées à leur activité dès 1977. L’idée de Jacques était d’intégrer progressivement ses enfants en leur donnant une part minoritaire des actions de l’entreprise. Au travers de l’intégration de ses enfants dans l’actionnariat, qui permettait d’informer ses enfants des nouvelles de l’entreprise, et de son orientation stratégique. L’histoire de son père François en mémoire Jacques avait le sentiment qu’il devait préparer sa relève, pour éviter de devoir vivre une relève expéditive et sans préparation comme ce fut le cas entre son père et les trois frères. C’est donc avec cette conception d’un père malade à 57 ans que Jacques concevait l’échéance à laquelle il devait avoir une solution de relève pour l’entreprise. C’est donc à partir des années 1990, à ses cinquante-cinq ans qu’il commença à bâtir un conseil consultatif qui allait entre autres aider à choisir son successeur. Les enfants avaient été invités à désigner un des leurs pour les représenter sur ce conseil, Martin (fils aîné) avait été l’élu.

Il était clair pour Jacques que la priorité est d’assurer la pérennité de l’entreprise. Par conséquent, son successeur devait être la personne la plus apte pour le faire, indépendamment qu’il s’agisse d’un membre de sa famille ou non. À la suite de l’établissement d’une liste de personnes qui pourraient potentiellement reprendre l’entreprise, le conseil consultatif par sa propre initiative a demandé de rajouter le nom de Martin Deschênes alors impliqué dans le groupe depuis quelques années. Après évaluation des habiletés de Martin, en délibération, le conseil a déterminé que Martin était la personne la plus à même de reprendre l’entreprise familiale. Cette nomination, non planifiée par Jacques, le remplit d’une profonde fierté, car il s’agissait de la quatrième relève familiale et de l’implication de la troisième génération dans la présidence. La relève étant nommée Martin et Jacques ont convenu du cheminement pour assurer une transition naturelle et efficace. Ainsi, Martin prit officiellement les fonctions de président-directeur général en 2000 avec une période de transition progressive des mandats de Jacques prévue pour une période maximum de trois ans. La qualité du transfert fut reconnue par le concours des Médaillés de la relève en 2008.

Passé la période de transfert, Jacques s’était entièrement retiré des opérations courantes pour laisser la place à son fils, cependant il conservait le rôle de président du conseil d’administration au sein du groupe. Ce transfert de responsabilité fut bien vécu par Jacques, car l’histoire de son père malade l’avait naturellement poussé à considérer cette période de retrait comme étant un passage naturel dans son chemin de vie auquel il s’était préparé. Il se focalisa donc dans de nombreuses philanthropies qui tenaient à cœur à lui et sa famille, tel que l’accompagnement aux familles en affaires du Québec. D’autre part, ce temps lui permettait de se centrer sur sa famille et ses passions telles que la nature, la pêche, et la chasse.

Soucieux de laisser sa place aux repreneurs, Jacques a tenu à s’impliquer le moins possible dans les décisions et orientations de ses successeurs. Cependant, il est resté disponible pour eux, et a démontré son soutien après le transfert dans plusieurs dossiers clés pour le groupe, dont son expérience et son réseau apportèrent une aide cruciale.

Martin Deschênes, avait planifié de quitter ses fonctions à 55 ans pour s’impliquer dans de nouveaux projets à l’extérieur de l’entreprise familiale. Le conseil d’administration avait alors pour but d’assurer cette transition dans une dynamique similaire à ce qu’avait vécu Martin. Fançois Deschênes (fils de Jacques et frère de Matin) était candidat au poste pour lequel il a dû démontrer au conseil d’administration qu’il était apte pour remplacer Martin, dont le rôle allait évoluer. Après de nombreux tests et réflexion pour valider ses capacités le conseil d’administration a considéré qu’il était la meilleure personne pour occuper cette fonction.

C’est habité d’une profonde fierté que Jacques porte un regard sur l’entreprise familiale qui a connu en 2017 un nouveau transfert interfamilial. C’est donc confiant dans sa capacité à bâtir l’avenir du Groupe Deschênes que Jacques laisse son fils François guider l’entreprise vers de nouveaux sommets, et assurer sa pérennité.

2022-01-05T15:25:58-05:00novembre 17 2021|Portraits, Nouvelles|

Amélie Rocheleau fait le grand saut dans l’entreprise familiale

Par Mélissa Laflamme-Ouellet, Chargée de projets à Familles en affaires

 Amélie Rocheleau a participé à la cohorte 1 du Circuit | Sur la voie de la relève de Familles en affaires HEC Montréal. À ce moment, elle se questionnait sur la possibilité de rejoindre l’entreprise familiale, le Parc nature Éco-Odyssée, fondée en 1997 par son père et sa mère. Un an plus tard, elle décide de faire le grand saut! Nous l’avons donc rencontrée pour en savoir plus sur son processus décisionnel et sur cette nouvelle aventure.

Mélissa : Est-ce que la Covid a accéléré ta réflexion? 

Amélie : J’ai enfin décidé de faire le saut à temps plein dans l’entreprise familiale! L’élément déclencheur a été de réaliser que nous avions suffisamment d’argent pour me payer un salaire à l’étude des états financiers. Je me suis alors dit : « Let’s go, je lâche mon job et on se lance! ». Je travaille désormais à temps plein chez Éco-Odyssée, même si nous sommes une entreprise saisonnière. C’est vraiment super.

En fait, le plan initial « pré-covid » était à l’effet que je quittais mon emploi le 1er mai 2020, et que je me lançais. Finalement, comme nous n’avons pas ouvert le parc nature au printemps en raison de la pandémie, que nous ne faisions pas d’argent et que tout était incertain, j’ai repoussé un peu mon arrivée. Finalement, dès que nous avons pu ouvrir, nous avons affiché complet tout l’été. Nos employés ont été vraiment géniaux et compréhensifs; nous avons ouvert Éco-Odyssée avec une semaine d’avis, alors qu’habituellement ça nous prend deux mois préparer le site.

Ça faisait deux ans que j’étais tiraillée entre deux emplois. J’imagine que c’est le cas pour beaucoup de participants du Circuit : tu as un travail, et tu t’investis un peu dans l’entreprise familiale. Maintenant, ça fait du bien de se lever le matin et de penser à une seule chose.

Clin d’oeil d’Annie

La décision de se joindre à l’entreprise familiale est un cheminement différent pour chacun/e des repreneurs. Les éléments déclencheurs pour Amélie témoignent de certaines des meilleures pratiques pour assurer un passage réussi : avoir travaillé ailleurs pour bâtir sa confiance en soi et sa crédibilité, pouvoir discuter avec d’autres repreneurs, joindre l’entreprise par commodité, et y être attendu et intégré.

Mélissa : Quels sont les projets à venir pour votre famille en affaires?

Amélie : Parc nature Éco-Odyssée a toujours été le centre des attractions touristiques pour notre entreprise. Maintenant, nous sommes à développer plein d’autres projets autour d’Éco-Odyssée pour que les gens puissent rester plus longtemps, avec un service d’hébergement et d’autres activités. Nous avons des projets courts, moyens et longs termes. L’été prochain, si tout va bien, nous aimerions amener le service de restauration, que nous n’offrons pas pour l’instant.

Nous avons aussi un projet de « refuge en nature »; nous avions déjà un gîte, mais ce projet est différent. Cela ressemble à des petites pièces qui proposent une fenêtre avec vue, ce qu’on appelle du « glamping[1] » dans notre jargon.

Un autre projet fait découler plein d’autres débouchés : nous travaillons depuis environ 6 mois avec une entreprise pour développer un sentier lumineux. Nous avons observé que dans la région d’Ottawa, un grand centre urbain avec environ 1M de visiteurs potentiels annuellement, il n’y avait pas vraiment d’offres du genre. Nous aimerions éventuellement aussi intégrer un labyrinthe d’eau, et permettre aux visiteurs de s’y promener la nuit pour assister à des projections lumineuses et interactives. Nous travaillons très fort sur ce projet; nous sommes présentement à la phase de monter notre plan financier qui représente plusieurs centaines de milliers de dollars.  En découlera l’aménagement du sentier, la restauration, et le réaménagement entier du site.

Il faut avoir les reins solides, et nous considérons le fait de trouver d’autres partenaires financiers. Nous sommes rendus à l’étape de « vendre notre salade » auprès des institutions. Toute l’histoire est déjà montée, l’élaboration des coûts, etc. Nous sommes bien organisés.

Clin d’oeil d’Annie

La pérennité d’une entreprise familiale est fondée sur la culture entrepreneuriale transmise à la prochaine génération. La fibre entrepreneuriale assure la régénération de l’organisation, de sorte que celle-ci soit en cohérence avec son environnement, et perdure. Voilà d’excellents exemples de projets « intrapreneuriaux » pour explorer de quoi sera fait le futur d’Éco-Odyssée pour les 25 à 30 prochaines années, le mettre en place, et l’exploiter. Un beau témoignage du sens de la pérennité entrepreneuriale.

Mélissa : Crois-tu que ces projets vont permettre à tes parents de lâcher prise sur les opérations de Parc nature Éco-Odyssée?

Amélie: Ils ont leurs projets personnels, ils veulent faire ce qu’ils ont envie de faire. Ils veulent nous laisser prendre en charge, mon frère et moi, l’aspect tourisme et service à la clientèle. Ils ont des projets agricoles avec des serres pour produire des produits transformés locaux. Nous aimerions amener un aspect communautaire dans le projet, parce que nous avons beaucoup de terrains où les gens pourraient s’impliquer et apprendre. Nous fournirions la machinerie pour les appuyer. C’est ça leur projet de « retraite » de mes parents!

Mélissa : Comment ont évolué les relations entre ton père, ta mère, ton frère et toi? Il y a un an, à ton entrevue pour la participation au Circuit, j’ai eu la perception que le climat était quelque peu « tendu » au départ.

Clin d’oeil d’Annie

Je trouve particulièrement intéressant, dans les extraits en lien avec la relation d’Amélie et son frère avec leurs parents, les notions de réciprocité dans le partage des savoir-faire et du savoir être entre les générations. Mutuellement, les membres de la famille s’apprécient pour leurs connaissances et leurs habitudes de travail développées au fil du temps, ou sur les bancs d’école…et ce, malgré les épisodes de turbulence que cela peut engendrer (tout à fait normales par ailleurs!). Voilà toute la richesse de la gestion multigénérationnelle.

[1] Le glamping, contraction de glamour camping, est un type d’hébergement touristique alternatif proche du camping, mais qui propose des séjours en roulotte, yourte, maison arboricole, etc., joints à une certaine qualité de confort en matière de literie, de sanitaires et de restauration. (Wikipédia)

2021-03-10T13:49:09-05:00février 17 2021|Portraits|

50 ans de préparation pour les Néron

Sans le savoir, pendant les 50 dernières années, la famille Néron de Cycle Néron s’est préparée à la crise que nous vivons actuellement. Plus récemment, plusieurs projets intrapreneuriaux menés par la 3e génération de l’entreprise ont d’ailleurs été déterminants à cet égard.  L’équipe de Familles en affaires a voulu en apprendre davantage en discutant avec Chloé Néron, une des repreneurs de cette 3e génération.

Familles en affaires : D’abord Chloé, nous aimerions savoir, comment va Cycle Néron?

Chloé Néron: Nous avons vécu le plus gros rush de l’histoire de l’entreprise depuis la réouverture « post-Covid » de nos portes en mai dernier; nous avons eu des files de clients comme jamais auparavant. Nous nous sommes « revirés de bord » rapidement. C’est ça qui est bien de l’entreprise familiale; on ne s’est pas posé de questions, et on a tous trouvé des solutions. Mon cousin et moi ont répondait au téléphone pour vendre les vélos, et mon oncle et mon père effectuaient les livraisons. Chez nous, on ne se pile pas sur les pieds, chacun trouve sa place, nous avons une complémentarité .

Le clin d’oeil d’Annie
Selon une étude réalisée par PwC suite à la crise de 2008-2009*, la très grande majorité des dirigeants déclarent que le caractère familial de l’entreprise leur a permis de mieux traverser ces bouleversements. Être une famille en affaires procure un capital humain loyal et dévoué, capable d’efforts soutenus. Chloé en témoigne concrètement aujourd’hui!

Familles en affaires : Selon toi, est-ce que cela fait une différence d’être une famille en affaires en temps de crise?

Le clin d’oeil d’Annie
Selon une étude réalisée par PwC suite à la crise de 2008-2009*, la très grande majorité des dirigeants déclarent que le caractère familial de l’entreprise leur a permis de mieux traverser ces bouleversements. Être une famille en affaires procure un capital humain loyal et dévoué, capable d’efforts soutenus. Chloé en témoigne concrètement aujourd’hui!

Familles en affaires : Peux-tu nous parler du premier projet qui t’a été confié dans l’entreprise familiale suite à tes études universitaires?

Chloé Néron : Chaque année, nous faisons une vente de fin de saison. Durant un souper familial suivant la fin d’une de ces ventes, je me souviens que mon père a dit : “Il faut couper des coûts à deux endroits : la production de la paie, et l’inventaire.” Je voulais un système spécifique, en prévision de préparer par la suite le Ecommerce… mon deuxième gros projet.

Familles en affaires : Qu’est-ce que ces projets t’ont permis d’accomplir et d’apprendre en tant que repreneure?

Chloé Néron : J’ai géré le projet moi-même, j’ai eu à prendre de grosses décisions, qui représentent de gros montants d’argent; j’ai vécu des journées plus stressantes que d’autres. Mon père m’a laissée aller et m’a confié le projet. Je n’ai pas eu « carte blanche », mais il m’a laissée de l’espace pour réaliser mon projet.

J’ai plongé sans trop savoir, et j’ai fait quelques erreurs en cours de route; je vais mieux me préparer et m’équiper pour la prochaine fois. Ce qui m’a le plus frustré dans mes projets a été de prendre des décisions sans savoir dans quoi je m’embarquais. D’ailleurs, en participant au Circuit, j’ai compris que je n’avais pas fini d’apprendre! J’ai envie de me perfectionner encore à l’extérieur de l’entreprise, d’aller me chercher des outils supplémentaires, et de pouvoir prendre des décisions plus éclairées. Je commence un microprogramme en commerce électronique à HEC Montréal en septembre prochain!

Le clin d’oeil d’Annie
Confier aux repreneurs des projets intrapreneuriaux importants pour la régénération et la croissance de l’entreprise, en les encadrant et en les supportant, est un véritable moyen concret de préparer la relève à diriger l’entreprise, et à être « entrepreneur ». Il en va de la crédibilité et de la légitimité des repreneurs auprès des équipes de travail, et au sein de l’organisation.

Familles en affaires : Quels ont été tes trucs pour te remonter le moral, dans la gestion de ces projets qui a été en « dents de scie »?

Chloé Néron : La famille ! Ma grande sœur est bonne là-dedans, c’est une maman dans l’âme. Elle m’a aidée à dédramatiser et elle est toujours rassurante. Je sais que lorsque je vis du stress, c’est parce que je me sens seule, et que tout le fardeau à gérer est sur mes épaules : en parler aux autres désamorce tout cela.

Le clin d’oeil d’Annie
Les membres de la famille, même s’ils ne travaillent pas dans l’entreprise, sont d’excellentes ressources pour accompagner ceux/celles qui y travaillent. N’oublions pas qu’ils possèdent la culture, et les valeurs familiales…Ils ont « baigné dedans »! Ils sont juste assez « proches », avec une dose d’objectivité externe, parfois nécessaire. Le mentorat est un autre très bon moyen de se faire aider, tout comme les groupes d’intérêt.

Famille en affaires : En terminant Chloé, est-ce qu’il y a eu un super héros au sein de votre entreprise, qui a émergé dans la gestion de cette crise?

Chloé Néron : Tout le monde m’a surpris! Ma sœur a un enfant à la maison; elle s’est occupée du clavardage sur le site. Elle vendait les vélos en ligne, et elle nous appelait pour qu’on finalise la transaction. Mon autre sœur a décidé de venir faire la caisse les samedis pour nous aider. Ma mère a tout fait à la maison pour que nous n’ayons rien à faire une fois de retour : notre lavage, notre souper, etc. Nous avons travaillé des heures de fou, et nos employés ont suivi. Ils étaient partants, malgré le fait que ce n’est pas une situation facile. Bref, la crise a montré la force de notre équipe!

Le clin d’oeil d’Annie
Sans que ce soit « scientifique », mes observations durant la crise ont démontré qu’effectivement, l’ensemble des membres du clan familial ont aidé et mis l’épaule à la roue dans plusieurs entreprises, même s’ils n’y travaillent pas au quotidien. En avril dernier, j’ai écrit : l’urgence de la pandémie a appelé le caractère innovant et résilient de la famille en affaires. Dès lors, on parle du capital de « survivabilité » des entreprises familiales. En voilà un exemple tangible, très bien exprimé par Chloé!

En savoir plus sur Cycle Néron

Cycle Néron est une entreprise familiale de 3e génération fondée en 1970 par Monsieur Roger Néron. Ses quatre enfants, Marc, Jean-François, France et Carole ensuite ont pris la relève de l’entreprise de leur père. Aujourd’hui ses petits-enfants, Stéphanie, Joëlle, Chloé, Anthony et Mia travaillent également tous dans l’entreprise.

Avec cinq points de ventes sur la Rive-Sud de Montréal et environ 40 employés, l’entreprise vise à être la référence en vélo de route, vélo de montagne et hybride au Québec et dans la région du grand Montréal.

2021-01-20T22:21:32-05:00août 13 2020|Portraits|

L’espace pour « l’essai-erreur » au sein de la famille Terrault

Le mercredi 3 juin dernier, l’équipe de Familles en affaires HEC Montréal, à l’occasion d’un webinaire, a eu la chance de s’entretenir avec  Valérie Terrault, l’une des repreneurs de l’entreprise familiale Laitues Mirabel.

Nous en avons donc profité pour lui poser quelques questions au sujet de ses projets au sein de l’entreprise familiale. Annie Veilleux, directrice de Familles en affaires, y a ajouté son petit grain de sel en commentant les réponses…un autre clin d’oeil intéressant!

Depuis ton entrée en poste il y a un an, parmi les projets que tu as réalisés, duquel es-tu la plus fière?

Dans le contexte de la COVID-19, dans les premières semaines, nous avons perdu plusieurs clients dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Des commandes nous étaient retournées qui ne pouvaient pas être livrées en raison de la crise. Nous nous sommes alors retrouvés avec des inventaires importants dans les frigos.

J’ai eu l’idée d’aménager un « marché éphémère » dans nos installations afin de vendre les stocks en trop de laitues, de concombres et de poivrons biologiques, tout en nous impliquant dans notre communauté, en les vendant à rabais. Nous avons mis en place un processus de paiement sans contact.

Les gens ont bien répondu, les voisins, mais aussi des gens qui ont fait 30 à 40 minutes de route pour venir nous voir. Au début, tout le monde pensait que ça n’allait pas fonctionner. Nous avons fait de grosses ventes, on ne s’attendait pas à cela. Initialement, le but n’était pas de faire de l’argent, mais de faire une différence auprès de la communauté, et d’éviter le gaspillage. Au début de la crise, l’approvisionnement alimentaire était incertain, alors on voulait s’impliquer. C’est un beau projet. Finalement, nous allons le poursuivre tout l’été.

Le clin d’oeil d’Annie
En général, nous remarquons que les repreneurs souhaitent ancrer davantage l’entreprise familiale au sein de sa communauté, et ainsi faire une différence notable. Déjà une caractéristique très présente chez la majorité des familles en affaires, les aspects communautaires, et le développement durable, sont exacerbés chez les plus jeunes générations. Ces valeurs fondamentales familiales déjà très présentes chez les Terrault, imprègnent inévitablement les valeurs de l’entreprise!

Quel impact a eu ce projet sur ta crédibilité auprès des employés et de ta famille?

Cela a renforcé le fait que lorsque j’ai une idée, je vais la concrétiser, sans que j’obtienne nécessairement l’appui des autres. Lorsqu’on m’a dit : « ça fait des années qu’on en parle, ça ne va pas marcher », c’est un défi que j’ai voulu relever.

On n’a pas révolutionné le monde par ce projet, et nous n’avons pas assuré la survie de l’entreprise en faisant cela, mais je pense que c’est un beau projet qui prouve que lorsque j’ai une idée, je vais l’amener à terme. Aussi, il est important de montrer que la pensée : « ça fait 33 ans qu’on fait ça et ça n’a jamais marché » n’est pas toujours valide; lorsqu’on approche le projet différemment, il y a moyen de faire arriver les choses.

Clin d’oeil d’Annie
Une famille entreprenante, et la culture de l’entrepreneuriat, se construit par le succès d’un projet à la fois pour les repreneurs…si petit soit-il.

Pour bâtir la crédibilité et la légitimité des repreneurs, il est important de leur confier des mandats, et de s’assurer qu’ils les mènent à terme en réussissant, ou en tirant des apprentissages. Ainsi, ils acquièrent du leadership auprès de leurs collègues, et aux yeux de leurs parents.

Plus un repreneur prendra en charge des projets d’amélioration, d’optimisation, et de régénération de l’entreprise, plus il prendra des risques, plus il vivra des expériences de façon encadrée, plus il se verra offrir du feedback…plus il deviendra un entrepreneur capable de prendre en charge la continuité de l’entreprise…

Est-ce que tu crois que la latitude reçue par tes parents te permet de gagner en confiance en toi, et de mieux te préparer à la reprise de l’entreprise?

La confiance reçue de la part de nos parents est l’ingrédient le plus important dans le processus de repreneuriat. Ils ont confiance en notre potentiel (Valérie, son frère et son cousin), et adhèrent à ce que nous aspirons à être. Ça donne un petit « boost »; lorsque quelqu’un croit en toi, ça te donne encore plus le goût de croire en toi.

Si la situation était différente, ce serait vraiment plus difficile; de toujours avoir à se prouver. Oui on doit se prouver, mais d’une manière hyper saine. Nous avons de bons parents et de bons mentors; ils jonglent avec ces deux chapeaux, qu’ils essaient du mieux qu’ils peuvent de mettre au bon moment.

Je réalise la chance que nous avons, ma plus grande chance c’est ma famille. L’entreprise va toujours être en 2e, c’est comme ça depuis que je suis toute petite. Même depuis que je travaille dans l’entreprise familiale, la famille est plus importante que tout. Même lorsque nous avons des accrochages, on ne laisse pas cela traîner très longtemps.

Clin d’oeil d’Annie
Mandater un repreneur à prendre en charge un projet intrapreneurial, et l’accompagner dans la réalisation de ce mandat, est un élément crucial pour l’aider à bâtir sa confiance en lui.
Et la confiance en soi est un ingrédient majeur, voire même un facteur clé, dans le succès d’une continuité de l’entreprise par les membres de la famille.

2020-11-02T14:17:53-05:00juin 11 2020|Portraits|

La famille Zhang entreprend autrement en temps de crise

Nous assistons présentement à une crise mondiale sans précédent qui affecte tous les secteurs de l’économie. Comme tous les types d’entreprises, les entreprises familiales doivent évoluer, s’adapter, voire même se réinventer. En contrepartie, de ces bouleversements émergent de belles opportunités que certaines familles en affaires saisissent. C’est le cas de la famille Zhang, qui a immigré de Chine en 1999, et qui a investi rapidement dans le secteur immobilier en achetant un premier bâtiment locatif. Quelques années plus tard, ils achètent un deuxième bâtiment de 67 unités à Brossard. L’entreprise détient maintenant plusieurs espaces commerciaux, et plus de 400 appartements locatifs qui comptent une forte proportion d’étudiants comme clientèle.

Depuis quelques années, Kai Xiong Zhang, le fils aîné, a joint l’entreprise familiale Helisis Management dans le but de la reprendre. Diplômé de HEC Montréal au BAA avec des spécialisations en finance et entrepreneuriat, et participant à la première cohorte du Circuit | Sur la voie de la relève, Kai a tous les outils pour réussir.

Plus récemment, l’équipe de Familles en affaires HEC Montréal a eu l’occasion de s’entretenir par téléphone avec Kai et son père Michael, afin d’en apprendre plus sur une autre dimension de leur patrimoine familial, soit une entreprise manufacturière dans l’industrie du textile située en Chine. L’oncle de Kai, le frère de Michael, possède et gère une entreprise produisant des vêtements de ski haut de gamme destinés à la vente en Europe et en Amérique du Nord. L’entreprise comptant plus de 350 employés, a dû adapter sa production en raison de la crise de la COVID-19, tout en respectant ses valeurs et celles de la famille Zhang. Voici donc 5 questions en rafale que nous leur avons adressées :

5 questions à Kai et Michael Zhang

1-  Comment et pourquoi la famille Zhang s’est adaptée en ce temps de crise?

MICHAEL: En février, le gouvernement chinois a demandé aux manufacturiers de textile de Chine d’adapter leur production afin de répondre à la demande mondiale pour de l’équipement médical de protection. Comme notre entreprise familiale avait déjà une main d’œuvre qualifiée pour fabriquer des blouses, nous avons adapté certaines de nos lignes de production afin de répondre à la demande en Europe et en Amérique du Nord. Nous n’avons pas cessé de produire des vêtements de ski, mais en moins grande quantité puisque la demande a baissé à ce niveau. Il est aussi important de noter que la demande pour de l’équipement médical est grande présentement, mais que nous avons tenu à ne pas augmenter les prix par conviction, et nous en sommes très fiers.

2- Comment votre famille « nucléaire », qui est maintenant au Québec, a été impliquée?

KAIL: Il est présentement très difficile de recevoir des équipements de protection de la Chine. Il y a quelques semaines, nous avons eu l’opportunité de faire un envoi de la Chine vers le Québec, et nous l’avons saisie. Nous avons fait le don de blouses et de masques à différentes organisations au Québec. Notamment, nous avons envoyé une boîte contenant quelques centaines de blouses et de masques vers le Nunavut, car ils avaient de la difficulté à s’approvisionner. J’ai aussi écrit au Premier Ministre, mais je n’ai toujours pas de réponse; Ha Ha!

3- Est-ce que vous prévoyez maintenir la production de ces produits suite à la crise?

MICHAEL: Il y a une crise mondiale, et nous devons penser en tant que famille en affaires à comment nous allons nous adapter. Peut-être que dans le futur, nous allons produire de l’équipement médical pour pallier à la baisse de la demande dans notre autre secteur d’activité principal. Nous y réfléchissons.

Présentement, plusieurs lignes de production s’affairent à produire de l’équipement médical, mais nous n’avons pas arrêté de produire des vêtements de ski pour l’Europe. Nous allons nous ajuster en fonction de la demande et des défis logistiques liés à l’expédition de la marchandise.

4- Familles en affaires : Comment la crise a changé vos relations familiales?

KAIL: Je suis très fier que ma famille soit impliquée dans quelque chose d’aussi critique pour la société présentement. Les gens sont très heureux de recevoir et de porter ces équipements. Le fait que nous ne prenons pas avantage de la situation en augmentant le prix me rend aussi extrêmement fier. Il est certain que cela va resserrer nos liens et mon attachement pour l’entreprise familiale, parce que je réalise qu’ensemble, en tant que famille, nous pouvons faire une différence, alors que si ce n’était que moi, je n’aurais pas été capable de faire tout cela. J’ai pu faire expédier de l’équipement ici grâce à mon oncle, je me rends compte qu’il y a beaucoup de choses qu’on peut faire ensemble.

5- Est-ce que d’autres membres de la famille, qui n’étaient pas impliqués au départ, ont mis la main à la pâte et comment?

KAIL: David, mon frère plus jeune, a 18 ans. Il n’est pas impliqué dans les entreprises familiales du tout, et il veut être médecin.

Lorsqu’il a appris que nous étions en mesure d’obtenir de l’équipement médical pour le Québec, il était vraiment motivé à m’aider à trouver une manière de faire expédier l’équipement ici. C’était la première fois que je le voyais aussi engagé…il m’envoyait de l’information pertinente, alors qu’habituellement il ne s’implique pas du tout dans notre entreprise en immobilier. Je crois qu’il a aussi réalisé qu’ensemble nous pouvions faire plus que seul.

2020-11-02T14:15:01-05:00avril 29 2020|Portraits|

Déclencher l’éveil entrepreneurial d’un repreneur familial grâce à l’intrapreneuriat

Lors du SPINE, le premier Sommet de l’intrapreneuriat au Québec, Familles en affaires HEC Montréal a conduit un atelier pour démontrer les dynamiques intrapreneuriales en contexte d’entreprise familiale. Les déclencheurs de l’éveil entrepreneurial des repreneurs ont été abordés par deux familles en affaires :

  • Pierre Thibault, fondateur de l’Atelier Thibault, une agence d’architecture spécialisée en conception d’espace;
  • Vyckie Vaillancourt, repreneure de 7ième génération de Ferme Vaillancourt, et fondatrice de O’Citrus, première entreprise de production locale d’agrumes fins sous serre au Québec.

 

L’intrapreneuriat et les déclencheurs de l’éveil entrepreneurial

L’intrapreneuriat met en place les conditions favorables pour développer l’intérêt entrepreneurial de la relève. Un projet à l’image du repreneur permet de créer une certaine distance avec l’entreprise familiale tout en octroyant une expérience avec les ressources de l’entreprise, avec le réseau de contacts de la famille et les différents cheminements de carrière à l’interne. De telles initiatives favorisent la préparation de la relève et le développement de la fibre entrepreneuriale. Voici quatre déclencheurs de l’éveil entrepreneurial qui ont émergé de cet atelier thématique.

  1. La liberté de choix : assumer ses choix de carrière et faire face à la pression familiale

Après six générations, la pression de reprendre l’entreprise s’est fait sentir, explique Vyckie Vaillancourt : « un jour, mon père m’a dit : si jamais ce n’est pas toi, c’est une pancarte devant la ferme. » Vyckie ajoute que ce n’était pas un ultimatum, mais davantage un constat, étant enfant unique! Une enquête de EY indique qu’au Canada, seulement 3.9% des jeunes issus de familles en affaires veulent reprendre l’entreprise après avoir terminé leurs études. Alors que 5 ans après avoir terminé leurs études, 6.5% des étudiants issus de familles en affaires démontrent une intention de reprise de l’entreprise familiale. La liberté de choix et l’acquisition d’expériences hors de l’entreprise familiale sont suggérées. « Il faut accompagner, il ne faut pas mettre le poids sur un enfant. C’est mieux qu’il fasse par lui-même ses choix et découvre par une autre façon. On crée des conditions par lesquelles l’enfant puisse faire le meilleur choix. Il doit développer son plein potentiel. »  explique Pierre Thibault.

2. L’ouverture : explorer d’autres secteurs d’activités ou d’entreprises avant le repreneuriat

Mme Vaillancourt précise que le déclenchement de l’éveil entrepreneurial peut être très long et qu’il est en effet important d’explorer d’autres cheminements de carrière : « Je viens d’une famille maraîchère, donc j’ai grandi sur la ferme. J’ai fait mes études en relations publiques et je ne voulais rien savoir [de l’entrepreneuriat] à ce moment-là. J’ai travaillé dans le domaine [de relations publiques] pendant 7 ans. Ça quand même été long, mon déclic. Ça m’a pris 27 ans avant de prendre ma décision. « 

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3. L’apprentissage : développer une dynamique entrepreneuriale dès le plus jeune âge

M. Thibault explique que « tout commence bien avant (l’âge de faire un choix), ce n’est pas au moment où tu es prêt de faire un choix de carrière. C’est bien avant que la dynamique s’installe. » Cultiver la fibre entrepreneuriale s’installe dès le plus jeune âge. Par exemple, le fils de M. Thibault a été intéressé à consulter les états financiers de l’entreprise, il n’avait que 14 ans. « Il s’intéressait déjà aux chiffres; il posait des questions et il a fait des recommandations pertinentes et qui ont même eu un effet quand même important sur la croissance. » affirme avec étonnement M. Thibault. Ça prend de l’ouverture et un niveau de confiance pour partager les connaissances et ainsi préparer les repreneurs. L’apprentissage venant de l’un et de l’autre, l’apport financier et le partage du réseau sont trois éléments favorables au développement de la dynamique entrepreneuriale.

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4. L’entrepreneurship : trouver un sens personnel

Mme Vaillancourt a suivi des études en entrepreneuriat, car elle s’est dit : « Si jamais je reprends une ferme, je n’ai jamais géré de business de toute ma vie. Il faut au moins que je m’outille un petit peu. » Suite à son projet final d’étude en entrepreneuriat à HEC Montréal, Mme Vaillancourt a développé un projet intrapreneurial qui lui a permis de trouver un sens personnel à la reprise de l’entreprise familiale. « J’ai trouvé une valorisation par mon projet, ce n’est pas celui de mes parents, c’est mon projet. Ça m’a montré que j’ai les outils et les capacités pour conduire moi-même une entreprise. » a-t-elle affirmé.

Annie Veilleux, directrice de Familles en affaires HEC Montréal, renchérit que « créer un projet intrapreneurial pour un repreneur dans une entreprise familiale, ça lui permet vraiment de sentir toute la puissance de l’entrepreneurship et ça lui permet de gagner en crédibilité, en légitimité, et en leadership au sein de l’entreprise. » L’intrapreneuriat est ainsi un levier de l’éveil entrepreneurial qui favorise la liberté de choix, l’ouverture, l’apprentissage et l’entrepreneurship. Mme Veilleux conclut que « l’intrapreneuriat est un mouvement de créativité et d’innovation pour sortir de sa zone de confort, autant pour les intrapreneurs que pour les personnes qui les accompagnent. Ça permet aussi à l’entreprise d’évoluer avec des projets novateurs pour se remettre ou s’assurer d’être en cohérence avec l’environnement.» L’intrapreneuriat active ainsi le développement d’une plus-value à l’entreprise familiale existante.

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2020-11-18T16:21:42-05:00décembre 4 2019|Articles, Portraits|
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